La théorie cognitive des émotions, solidement ancrée dans la psychologie moderne, affirme que nos émotions sont en partie influencées par notre cognition. Selon les stoïciens, les émotions ne se résument pas à de simples réponses automatiques aux événements externes, mais découlent plutôt de nos jugements et de nos interprétations de ces événements.
Ils insistaient sur le fait que notre capacité à moduler nos émotions réside dans notre aptitude à ajuster nos pensées et nos évaluations. Autrement dit, ils croyaient que si nous pouvions changer notre manière de penser ou de juger les choses, nous pourrions changer la manière dont nous ressentons les émotions.
Dans ce cadre, les stoïciens ont développé le modèle suivant pour parvenir à des décisions et des actions éclairées, même lorsqu’ils sont confrontés à une réaction émotionnelle initialement problématique face à une situation :
Impression > Assentiment > Impulsion d’action
Une « impression » (Gr. phantasia) se réfère à une expérience mentale subjective au cours de laquelle notre esprit interprète quelque chose comme étant réel ou présent même si ce n’est pas objectivement vrai. C’est une sorte de première réaction mentale à une situation ou à un stimulus.
L' »assentiment » représente le moment où nos pensées prennent forme en croyances concrètes. Ce phénomène est parfois désigné par les termes « jugement » (krisis) ou « formation d’une opinion » (doxazein). En ayant une impression, l’esprit enregistre cette expérience et l’évalue en analysant ses fondements, ses sources et son contexte. Ensuite, il décide si cette impression est crédible et basée sur la réalité objective, ou si elle est influencée par des émotions, des préjugés ou des croyances personnelles. Ce processus mental aide à forger une opinion sur cette impression, en permettant de distinguer entre la réalité objective et les interprétations subjectives des événements et des expériences.
Une « impulsion » (ou « hormai ») est un élan vers l’action, généré par l’assentiment que nous donnons à une impression. Si nous jugeons une impression comme étant vraie et utile, cela générera une impulsion à agir en conséquence. Par contre, si nous jugeons une impression comme étant fausse, cela n’engendrera pas d’impulsion à agir.
Pour illustrer, prenons l’exemple d’une personne qui ressent une intense soif résultant de sensations internes. Si elle accepte cette sensation comme étant réelle, son esprit l’approuve, ce qui entraîne une impulsion à agir. Dans ce cas, la personne se lève, se dirige vers le réfrigérateur et se sert un jus pour apaiser sa soif. Cette impulsion découle directement de l’assentiment donné à l’impression initiale, ce qui démontre l’influence directe de nos pensées sur nos comportements quotidiens.
Pourquoi cette pratique est-elle si cruciale pour les disciples de la pensée stoïcienne ?
Les impressions sont des réponses immédiates et spontanées à des stimuli sensoriels externes ou internes. Nous ne pouvons pas les contrôler. Cependant, selon Épictète, notre assentiment relève de notre volonté (Enchiridion 1.1). C’est ce processus mental qui détermine nos impulsions à agir, et il est dans notre sphère d’influence. Ainsi, notre capacité à contrôler notre assentiment signifie que nous avons le pouvoir de guider nos réactions et nos comportements, indépendamment des circonstances externes ou des opinions des autres. Ce principe stoïcien met en lumière que, même si nos impressions initiales peuvent être influencées par des facteurs externes, notre aptitude à évaluer ces impressions demeure intrinsèquement sous notre contrôle.
Prenons l’exemple suivant : Même si je suis fatigué et que j’ai un fort désir de dormir, je peux faire le choix de rester éveillé pour terminer un projet important avant de me reposer. Bien que l’envie de dormir soit forte, je peux décider de ne pas y céder immédiatement et donc de ne pas générer l’action, par exemple parce que j’ai peur de me déconcentrer. Je prévois donc de terminer mon projet en premier lieu, puis je me lèverai et me dirigerai vers le lit pour me reposer.
En fait, tout ce qui précède devrait être plutôt incontestable, et pourtant nous entendons fréquemment des déclarations telles que « Je n’avais pas d’autre choix » ou « Je n’arrive pas à contrôler mes émotions ». En réalité, c’est tout à fait possible. Cependant, réguler nos émotions exige un effort et des explications plus approfondis par rapport à la maîtrise de nos actions, qui est plus facile à gérer.
Commençons par examiner le contrôle de nos actions. En réalité, tout ce que nous faisons repose entièrement sur notre propre volonté, indépendamment des influences externes. Épictète exprime cette pensée avec une franchise caractéristique :
« Mais le tyran enchaînera » Qu’enchaînera-t-il ? Votre jambe. Il coupera – quoi ? ta tête. Ce qu’il n’enchaînera ni ne coupera jamais, c’est ton intégrité ». (Discours I, 18.17)
Même dans les cas extrêmes décrits par Épictète, un tyran qui vous enchaîne ou qui menace de vous tuer, vous êtes libre de décider comment agir. Si vous choisissez de vous soumettre à la volonté du tyran afin d’éviter la prison ou de sauver votre vie, cela est compréhensible, car la plupart d’entre nous feraient probablement de même. Néanmoins, il est important de ne pas se tromper en pensant que vous n’aviez pas d’autre choix. Vous auriez pu choisir d’accepter la prison ou de risquer l’exécution, comme d’autres l’ont fait. C’est pourquoi Épictète nous met en garde : « Considérez à quel prix vous vendez votre intégrité ; mais s’il vous plaît, pour l’amour de Dieu, ne la vendez pas à bas prix. (Discours I, 2.33)
Bien que nous puissions avoir l’impression de ne pas avoir de contrôle sur nos émotions, il existe au moins une émotion sur laquelle nous avons un pouvoir significatif : l’excitation sexuelle. Les êtres humains peuvent déclencher volontairement l’excitation sexuelle en pensant à une situation érotique, ce qui provoque les mêmes réactions physiologiques que lors d’une relation sexuelle réelle. Cela prouve que nous avons la capacité de contrôler nos émotions, même celles qui semblent incontrôlables.
Toutefois, le vrai défi réside dans notre capacité à calmer nos émotions. Par exemple, si nous ressentons une excitation sexuelle mais réalisons que ce n’est ni le bon moment ni la bonne personne, nous pouvons facilement nous détacher de cette émotion en nous exposant à d’autres stimuli ou en focalisant nos pensées sur autre chose.
Aperçu final
Les émotions que nous ressentons ne sont pas incontrôlables, mais plutôt influencées par nos pensées et notre interprétation du monde qui nous entoure. En remettant en question nos réactions émotionnelles et en affinant notre jugement, nous sommes capables de transformer notre perspective et de mieux comprendre nos émotions. Cette prise de conscience nous offre l’opportunité d’améliorer notre vie, en nous permettant de choisir des réponses émotionnelles plus constructives, plutôt que de nous retrancher derrière des excuses comme « Je n’arrive pas à contrôler ce que je ressens ».

Rob A. Hodge, fondateur de Primate360 et MasculineNotion. J’ai lancé mon premier site en 2022 pour les personnes qui souhaitent en savoir plus sur la forme physique et la ténacité et force mentale en général auprès de personnes qui ont réellement de l’expérience dans ces domaines et qui y ont réussi. Je suis là pour vous aider à obtenir des résultats. Je vous ferai savoir ce qui fonctionne réellement et ce qui ne fonctionne pas, tout est axé sur les résultats.